Faut-il que l'ONU reste en République Centrafricaine ?

Publié le par CENTRAFRIQUE EN LIGNE

Selon le programme établi conjointement par l'ONU, la République Centrafricaine et le Tchad, la Mission des Nations Unies en République Centrafricaine et au Tchad (MINURCAT) doit retirer ses dernières troupes de sa zone d'opération le 31 décembre prochain. Le président du Tchad, Idriss Déby, s'est lui montré très favorable au retrait de cette mission qu'il a jugé "inutile". En effet, le 25 septembre 2007, le conseil de sécurité de l'ONU a déployé une force de maintien de la paix dans le nord de la République Centrafricaine et dans l'est du Tchad, en lieu et place de l'EUFOR, afin de mettre fin à l'insécurité persistante dans ces régions. Des soldats français, togolais, malawites, népalais ou encore pakistanais commandés par le général sénégalais Kandji ont tenté parfois valeureusement de protéger les populations civiles et de sécuriser les camps de réfugiés. Il n'en reste pas moins que l'intervention de la MINURCAT est un cas d'ingérence grave dans la souveraineté nationale de ces deux Etats, d'autant que son comportement ne fut pas des plus irréprochables. En effet, nous pouvons ici nous remémorer les dérives d'un soldat français qui, pris d'un coup de folie, tua trois de ses comparses, dont un soldat togolais. Il y eût également un comportement d'un paternalisme des plus archaïques de la part de certains des officiers de la MINURCAT envers les troupes des deux Etats concernés par la présence de la dite mission.

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Alors nous pouvons légitimement nous demander pourquoi la RCA, au contraire de la République du Tchad, a-t-elle demandée la maintien d'une MINURCAT agonisante ? Pourquoi, le Général de Division Antoine Gambi, Ministre des Affaires Etrangères de la République Centrafricaine, a-t-il renoncé à la sauvegarde de sa souveraineté nationale au profit de présence d'une Mission des Nations Unies à l'efficacité parfois douteuse ? D'aucuns répondront que Les Forces Armées Centrafricaines (FACA) ne sont pas en mesure d'assurer seules la sécurité des populations dans le nord de la République Centrafricaine, pas assez formés pour contenir le harcèlement permanent des mouvements politico-militaires qui sont légions dans les régions de la Vakaga et du Bamingui-Bangoran. Les plus vindicatifs rétorqueront que la République Centrafricaine est un Etat déliquescent qui n'est même pas apte à assurer l'intégrité de ses frontières. D'autres enfin sacraliseront le rôle des Nation Unies, oubliant un peu hâtivement les exactions dont ont pu se rendre coupable des casques bleus en République Démocratique du Congo (RDC).

Il nous faut ici répondre à ceux qui affirment tout de go ces inepties, sans démagogie aucune toutefois. Comme l'a proclamé le président tchadien Idriss Déby Itno, le retrait de la MINURCAT est une affaire de souveraineté nationale, même si certaines rébellions au Tchad (ANCD, FPRN, UFR...) et en République Centrafricaine (CPJP, FPRN, MLCJ, FDPC, MPDR, UFDR) peuvent encore troubler la quiétude des populations. D'autant que la MINURCAT n'a contribué en aucun cas à la résolution des conflits dans la région où elle opérait, manquant d'attributions et de moyens pour véritablement agir avec efficacité. Et il serait indécent de remettre en cause le courage de FACA épaulées par des éléments de la garde présidentielle centrafricaine (BPSI), bien déterminées à éradiquer la présence de ces mercenaires sur le territoire centrafricain. Le lancement de la Réforme des Secteurs de Sécurité (RSS), qui doit porter les effectifs de l'armée centrafricaine de 6500 à plus de 10 000 hommes, dénote une volonté inébranlable de la part du gouvernement centrafricain de mettre fin par elle-même à une situation difficilement supportable pour les populations civiles du nord de la République Centrafricaine. 

En fin de compte, il conviendrait que la République Centrafricaine se prenne en main pour annihiler par elle-même ce problème épineux. Ainsi, elle ferait un grand pas vers son indépendance de facto, gardant ses distances avec les des organisations internationales un peu trop interventionnistes. Mais il n'en reste pas moins qu'en lieu et place de la présence physique de l'ONU, une coopération technique avec les instances internationales (comme l'a proposé Ban Ki-Moon), notamment en matière de renseignement et de formation des unités de combat, est à envisager afin que les FACA puissent disposer de troupes plus aptes à assurer la présence de l'Etat de droit sur tout le territoire centrafricain. En attendant, et ce dès le 31 décembre prochain, il serait non dénué d'esprit que le gouvernement centrafricain prépare dès aujourd'hui un plan novateur afin d'assurer une présence sécurisante et constante des FACA dans tout le nord du pays, palliant ainsi le retrait de la MINURCAT. Ce plan proposerait pourquoi pas un renforcement accru des patrouilles frontalières (organisées conjointement avec l'ANT, l'Armée Nationale Tchadienne) et l'accroissement de la présence des services de renseignement (SRI) dans les préfectures concernées afin de prévenir toute nouvelle agression. Il en va de l'avenir du pays....

Une contribution de JONAS ABBO TSHIPOPO

Rédaction centrafriquenligne.com

Publié dans EDITORIAL

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